Écologie et lutte des classes : dire de quelle écologie notre désir politique est le nom

Écologie et lutte des classes : dire de quelle écologie notre désir politique est le nom : Un texte écrit par l’équipe de L’ardeur, association d’éducation populaire politique.

Suite à la parution de notre article COVID-19, l’ami des dominants, de nombreux commentaires nous ont été adressés. Plusieurs d’entre eux s’alertaient de l’absence d’analyse des enjeux écologiques : « Après vérification, sur les 6653 mots que comporte votre texte, le mot écologie n’apparaît pas une seule fois ! Dois-je conclure à l’absence de conscience écologique de L’ardeur ? ». Nous nous devions une réponse : non, L’ardeur n’est pas dépourvue de conscience écologique. Il n’en reste pas moins exact que nous ne recourons que très peu à l’usage de ce terme. Et pour cause…

L’écologie, un mot sans histoire

Invité par le Média en mars dernier, le philosophe québécois Alain Deneault affirmait: « Le mot Écologie est de trop. Il nous encombre. Il nous fait voir double, voire trouble ». Reprenant durant cette interview la thèse de son ouvrage L’économie de la nature, Deneault revient sur l’histoire du mot « économie ». L’expression « économie de la nature » a surgi au 18e siècle dans le vocabulaire des sciences bien avant que le néologisme « écologie » ne s’impose à nous, plus d’un siècle et demi plus tard. L’économie de la nature désignait alors l’organisation des interactions entre les humains et leur milieu au vu du climat, du territoire et de leur évolution. Cette économie pensait la relation féconde entre tous les éléments du vivant. L’économie était écologique par essence, et associer ces deux termes « économie » et « écologie » aurait relevé de la tautologie. Le problème c’est que, progressivement, le mot économie va être dévoyé par une corporation d’autoproclamés « économistes ». Ils vont lui appliquer l’idéologie de la performance, du rendement, de la concurrence, de la compétition et le faire entrer dans une relation intrinsèque au capitalisme. Ça va marcher… si bien qu’aujourd’hui, si on nous dit « économie », nous n’entendons plus que « capitalisme ». Les deux mots sont devenus des synonymes alors qu’ils sont historiquement d’exacts contraires. On utilise aujourd’hui ce mot pour désigner des méthodes de destruction, d’impérialisme, et de développement illimité des inégalités… c’est orwellien !

Ce mot « économie » avait une histoire, et nous aurions dû nous battre pour ce mot au lieu de l’abandonner au capitalisme qui en a fait la saloperie que nous connaissons aujourd’hui. Il nous a alors fallu inventer de nouveaux mots. L’écologie est de ceux-là. Le problème est que ce mot, déconnecté de l’économie (comme s’il s’agissait de deux champs distincts), ne nous raccroche pas à une histoire. L’écologie peine à s’ancrer dans une définition nous permettant de penser les problèmes en terme politique (la politique étant la désignation d’un adversaire). C’est devenu un fourre-tout. Un étendard que quiconque, y compris le pire destructeur d’humanité, peut agiter. Tout le monde est devenu écolo. Macron est écolo. Jadot est écolo. Arnault est écolo. L’Oréal, Coca-Cola, IKEA sont écolos et n’hésitent pas, en cette période de crise sanitaire, à signer une tribune appelant à « l’alliance européenne pour une relance verte » (le capitalisme vert, ce bel oxymore, rendant possible la coupe à blanc de l’intégralité des forêts du monde par des bulldozers… fonctionnant à l’énergie solaire !). Dernier exemple en date : la multinationale américaine BlackRock, l’un des investisseurs les plus importants des plus grandes firmes pétrolières mondiales, vient d’emporter un marché de la Commission européenne pour « incorporer dans la surveillance bancaire les facteurs environnementaux et sociaux ». Comme le dit une eurodéputée écolo, c’est « confier à Al Capone la lutte contre le grand banditisme ». Si de telles supercheries sont possibles, c’est que l’écologie « officielle » est purement abstraite et autodéclarative (ce qu’on appelle le « greenwashing » : ainsi le transport aérien arrive-t-il aujourd’hui à se faire passer comme l’une des activités les plus engagées dans la lutte contre le dérèglement climatique !). Convoquer discursivement l’écologie ne suffit plus, et il devient urgent de préciser de quelle écologie notre désir politique est le nom.

Pour une écologie politique

En appeler à une écologie politique laisse penser qu’il existe a contrario une écologie non politique ou apolitique, voire anti-politique. Il s’agit en fait d’une écologie « dépolitisante »… Comprenez par là : une écologie qui nous détourne de la lutte des classes (seule remise en question possible du système capitaliste) et tue notre esprit critique en nous présentant les problèmes, non plus comme la résultante de choix politiques globaux, mais comme la conséquence de comportements individuels inconséquents. Exit l’analyse structurelle des rapports de domination et d’exploitation, exit le combat collectif contre l’ordre établi… l’heure est désormais à l’auto-responsabilisation. Et pour cela, il va falloir se prendre individuellement en main et trier ses déchets, consommer bio, se déplacer à vélo, s’essuyer les fesses avec du papier ressemblant à un journal de l’Est… Comme le colibri, nous devons « faire notre part ». Cette écologie vous parle ? Elle a un nom : l’écocitoyenneté.

Rien n’est plus politique que la dépolitisation d’un processus politique. Le développement de cette écologie dépolitisante marque le triomphe de l’individualisme loué par le libéralisme (terreau sur lequel le développement personnel, idéologie libérale qui invite chacun à se considérer comme un « entrepreneur de soi » en faisant fructifier ses propres performances dispositionnelles, s’épanouit). « La société n’existe pas, disait Thatcher, il n’y a que des individus », et c’est la somme des gestes individuels du quotidien qui peut changer les choses. Nous ne marcherons pas… Nous ne serons pas plus pigeons que colibris.

Dans son ouvrage La Question climatique, genèse et dépolitisation d’un problème public, Jean-Baptiste Comby nous montre comment l’inoffensive « morale écocitoyenne » est sans cesse promue par les élites administratives, politiques, médiatiques, financières et scientifiques. Il s’agit de faire peser sur les seuls individus tout le poids du massacre des écosystèmes. Et de la responsabilité individuelle à la culpabilisation, il n’y a qu’un pas. Irresponsables et mauvais consommateurs : voilà en gros pour qui cette écocitoyenneté nous fait passer. Le problème, c’est que le message finit par être intégré. Nous sommes frappé.e.s de voir à quel point le discours « le problème d’aujourd’hui, c’est la consommation » est ancré, y compris à gauche. C’est là qu’il convient de refaire un peu de marxisme élémentaire : la consommation n’est pas le levier de la lutte des classes, c’est le travail, c’est la production qui en sont les leviers ! Jamais dans l’histoire, des consommateurs n’ont produit de révolutions en redirigeant leurs achats. Alors non, le problème d’aujourd’hui, ce n’est pas la consommation. Elle est éventuellement une conséquence du problème, mais elle n’en est pas sa cause. Et vouloir régler un problème en s’attaquant à sa conséquence, comme le dit François Bégaudeau, c’est comme vouloir soigner une gastro en astiquant la cuvette de ses toilettes : c’est inepte. On ne changera pas le système en devenant de bons consommateurs et tant que nous considérerons la consommation comme notre seul pouvoir, nous serons les idiots utiles du capitalisme. Consommateur éthique, consom’acteur (oh, la vache, le bel oxymore !), consommateur citoyen… avouons-le : nous ne sommes plus grand-chose dès lors que nous sommes réduit.e.s au statut de consommateur (fût-il vertueux) et que l’acte de choisir ce que nous consommons devient notre seul pouvoir.

Cette « méthode Hulot » (l’avenir de la planète est entre vos mains, pensez à éteindre la lumière avant de vous coucher !), servie à toutes les sauces pendant 30 ans sur TF1 (tiens donc : Bouygues aurait-il des intérêts à promouvoir les éco-gestes ?), trouve son aboutissement dans le film à succès de Cyril Dion et de Mélanie Laurent : Demain. Apôtres de Pierre Rahbi, les deux cinéastes donnent à voir « des solutions pour construire une autre histoire de l’avenir ». Panneaux solaires, éducation bienveillante, permaculture… il s’agit de promouvoir les « révolutions tranquilles » (encore un bel oxymore ! Nous savons bien qu’aucune révolution ne se fait autrement que dans la violence et que, comme l’affirme Frédéric Lordon, la révolution n’a jamais été un pique-nique). Raccroché à ce film, le même message : c’est par une myriade d’actions individuelles et d’initiatives locales que nous parviendrons à enrayer la marche vers la catastrophe climatique. Le grand patronat ricane. Pas nous…

Dans le monde du petit bourgeois écocitoyen, le paradoxe est qu’on peut entendre des critiques parfois radicales du système politique et économique. Les personnes sont conscientes de la gestion désastreuse de la crise sanitaire, des inégalités et des rapports de domination qui structurent le système capitaliste et de leur accentuation dans des périodes telles que nous en vivons actuellement. Mais dès lors qu’on évoque les solutions pour sortir de ce système, le discours glisse inéluctablement vers des réponses toutes faites de type : apprendre à cultiver son jardin, vivre en autonomie dans des collectifs… Dans ce système néolibéral tourné vers l’individu et non vers la société, on ne sait plus imaginer un changement sociopolitique, et la langue de bois termine le travail en parlant de « collectif » et d’« alternatives ». Un collectif, s’il est un groupe, ne fait pas société ! Les projets alternatifs existants ou en devenir sont révolutionnaires s’ils transforment radicalement l’ensemble des modes de production, de consommation et notre rapport au travail. Ils ne le sont pas s’ils ne bousculent pas les modèles existants ; ils ne le sont pas si, en agriculture par exemple, ils ne remettent pas en cause l’industrie agro-alimentaire mondiale. Et l’on peut donc cultiver nos pommes de terre dans des petits collectifs de vie fort confortables ou non, cela n’aura aucun incidence sur le climat, pas plus que sur la politique ou la justice sociale…

Entendons-nous bien : il ne s’agit pas ici de dénigrer toutes ces « alternatives concrètes » auxquelles nous participons parfois, les un.e.s et les autres. AMAP, systèmes de troc ou d’échanges basés sur le temps, habitats collectifs, coopératives et « vraies » mutuelles… sont autant d’initiatives qui nous intéressent. Car elles nous aident à comprendre, concrètement, la distinction entre « économie » et « capitalisme » : oui, on peut « faire économie » avec d’autres modes de propriété, d’autres rapports sociaux et d’autres modes de décision que ceux du système marchand capitaliste. Par leur vertu pédagogique, elles participent ainsi du mouvement d’éducation populaire dans lequel nous nous inscrivons. En revanche, nous nous opposons à l’idéologie qui les accompagne trop souvent : cette idée selon laquelle les défauts du capitalisme pourraient être jugulés par de nouveaux comportements inscrits dans la sphère locale. C’est une pensée réformiste. Or, la pensée réformiste (la fameuse social-démocratie) a toujours été l’alliée du pouvoir capitaliste. Face à cela, il nous faut convoquer une pensée révolutionnaire et rappeler qu’aucun changement n’est possible s’il n’est pas pensé dans le cadre d’une action collective, globale et radicale.

Pour une écologie inscrite dans la lutte des classes

Ici aussi, il convient d’être marxiste : notre société est conflictuelle car elle est organisée en classes antagonistes. Et il y a une classe dominante qui, par sa possession du capital et des moyens de production, exploite les autres classes. Cette classe, c’est la bourgeoisie. Mener la lutte des classes, c’est s’attaquer à cette classe, donc au régime de propriété lucratif qui en est sa caractéristique. Antonio Gramsci en appelait pour cela à la constitution d’un « bloc historique » : l’alliance entre les deux cœurs historiques de la gauche : la classe ouvrière et la petite bourgeoisie intellectuelle. En gros, les classes populaires et les classes intermédiaires unies pour combattre la bourgeoisie… en espérant que la morale écocitoyenne ne vienne pas contrarier cette alliance…

« Le problème avec les classes populaires, c’est qu’elles n’ont pas conscience des enjeux environnementaux »… Le petit bourgeois est d’accord sur ce point. D’accord sur le fait que le pauvre ne pense qu’à consommer, et que c’est pénible un pauvre. Et puis un pauvre, ça ne trie pas ses déchets, ça laisse la lumière allumée partout dans la maison, ça mange n’importe comment, ça oublie de fermer les robinets, ça prend la bagnole pour le plaisir de cramer du gazole… Et tant pis si toutes les études montrent que les classes populaires, par leur mode de vie, polluent bien moins que les autres classes sociales, le petit bourgeois n’en démord pas : le pauvre est irresponsable.

C’est sans doute qu’il n’a pas fait de « travail sur lui », le pauvre. Dans le cadre de la crise du coronavirus, certaines personnes ont exprimé combien elles vivaient le confinement de manière positive : retraite méditative, retour vers soi, parenthèse unique… Elles ajoutaient qu’elles parvenaient à vivre sereinement cette expérience parce qu’elles avaient effectué un travail sur elles en amont, et que les personnes qui n’avaient pas fait ce travail devaient sans doute vivre beaucoup moins bien le confinement. Qui sont donc ceux qui n’ont pas fait ce travail sur eux ? Les pauvres, bien entendu ! Jamais nommés comme tels, mais ce sont bien ces Autres par qui tous les problèmes arrivent et qui ne savent pas les transcender, eux, les problèmes ! Mépris de classe, et manque d’humilité dans le fait de ne pas considérer que les conditions matérielles d’existence sont essentielles dans la capacité à affronter de tels événements. Dans le fait de ne pas voir que la « force intérieure » dans la crise sanitaire ou « la conscience écologique » dans la crise climatique ne sont que des supports de distinction sociale, des manières de désigner des irresponsables ou des coupables, et de se désolidariser du reste de la société. Il faut lire et relire Happycratie (d’Edgar Cabanas et Eva Illouz) pour nous rappeler que faire le choix de l’épanouissement personnel, c’est nous couper de toute forme de justice sociale.

Voilà ce que l’écocitoyenneté, en tant qu’injonction à « l’auto-responsabilisation » et au « travail sur soi », provoque : l’incrimination des classes populaires, le mépris de classe. Elle permet aux classes dominantes de faire de l’écologie un outil de distinction, c’est-à-dire un marqueur d’appartenance de classe et de hiérarchisation sociale. Un post a récemment (et abondamment) circulé sur les réseaux sociaux  : « Je me demande souvent pourquoi les gens sont aussi ignares en matière de climat et d’écologie et aussi irresponsables en matière de consommation… et puis, je me suis souvenu qu’on en était à la saison 15 de Plus belle la vie ! ». Si l’écocitoyenneté réussit ce tour de passe-passe de « faire détester les opprimé.e.s et aimer ceux qui les oppriment… », elle est donc une écologie bourgeoise.

Elle est également une écologie patriarcale. Car le capitalisme et le patriarcat sont intimement liés. Sur les dirigeants des 100 entreprises responsables de 70 % des émissions mondiales de carbone, combien de femmes PDG, combien de femmes actionnaires ? Pourtant, quand l’écologie moralisatrice vient nous demander de faire des efforts individuels, jamais elle ne pointe la responsabilité de la classe des hommes (et pour cause puisque la fonction de l’écocitoyenneté est justement d’invisibiliser les rapports de domination). Si ce sont les classes populaires qui sont accusées d’être les responsables individuels de la surconsommation, notons que c’est la classe des femmes qui paye la note au prix fort. Se retrouvant « globalisées » dans la lutte pour la planète, les femmes se mettent au travail pour réparer, prendre soin, jouer le seul rôle qu’on leur concède : investir les collectifs Colibri, AMAP, SEL et autres. Elles refont des yaourts et des gâteaux maison, ressortent la machine à coudre de maman pour confectionner des sacs à vrac, courent les recycleries, lisent les étiquettes dans les magasins, nettoient les couches lavables, etc. L’Observatoire des inégalités nous rappelle que les femmes font toujours 1h30 par jour de tâches domestiques de plus que les hommes. Et face à l’injonction écocitoyenne, elles voient leur charge mentale maintenue dans une lutte dépolitisante, qui fait d’elles des soignantes (tiens, tiens !) de la vie et les empêche de se penser comme sujets politiques.

Pour une écologie anticapitaliste

Le consensus environnemental bidon, répétant qu’on habite toutes et tous la même planète et que chaque personne doit prendre soin d’elle-même en se responsabilisant individuellement, s’est trouvé renforcé par l’apparition d’un terme : l’anthropocène. Entendez par-là : l’humain serait responsable et fautif du désastre écologique. Fichtre ! C’est donc lui le problème ! Mais comment s’y prend-il donc l’humain pour détruire la planète ? Organise-t-il dans les quartiers populaires des réunions secrètes pour réfléchir à la façon de produire toujours plus de bagnoles ? Se retrouve-il au bistrot à la sortie de l’usine pour réfléchir avec les collègues au saccage des forêts du monde ? Part-il en bande organisée durant ses congés pour pulvériser les glaciers afin d’extraire du gaz ?

Pierre Rabhi ne cesse de nous rappeler que l’Homme, « en perdant le contact avec la nature », a causé la panade environnementale dans laquelle nous nous trouvons. Mais l’Homme, l’Humain sont des notions totalement dépolitisantes. Elles masquent les rapports d’exploitation à l’œuvre et les enjeux systémiques de cette exploitation. Elles amalgament l’ensemble des classes sociales au sein d’une même « espèce humaine », voilant ainsi les rapports de forces politiques qui traversent notre société capitaliste. Parler de l’Humain, c’est mettre dans le même sac Vuitton Bernard Arnault et l’ouvrière des ateliers d’Armançon (sous-traitant du groupe LVMH) payée 8 € de l’heure.. c’est un peu gros, non ? Car qui décide du cours du monde, donc qui est responsable si ce cours nous conduit au désastre environnemental actuel ?

Il nous faut arrêter de parler « d’anthropocène » et le remplacer par le terme « capitalocène ». C’est bien le capitalisme qui pille et saccage notre biotope pour générer des milliards de profits, au bénéfice d’une minorité, et au détriment du plus grand nombre. C’est donc la fin du capitalisme qu’il faut penser, et non (n’en déplaise aux adeptes de la collapsologie) la fin du monde et la fin de l’Homme dont ce monde aurait accouché.

Depuis quelques jours, un courrier adressé au gouvernement par le Medef circule sur les réseaux sociaux. Il demande qu’en cette période de crise sanitaire, autorisation soit donnée aux multinationales de contourner, voire de supprimer, les lois et réglementations environnementales, et de réviser la directive « émissions industrielles ». Ces gens-là ne tireront aucune leçon de cette pandémie. Au contraire. Elle sera pour eux l’opportunité d’une accélération des destructions. Et nous n’avons pas d’autres choix que de nous débarrasser de cette classe néfaste… nous n’avons pas d’autre alternative que de sortir du capitalisme.

La seule action écologique qui vaille : reprendre la main sur l’économie

Puisque le mot « économie » nous a été volé par le capitalisme, nous allons le leur reprendre en même temps que nous leur reprendrons le pouvoir. Nous allons reprendre l’économie aux économistes de l’ordre capitaliste. Nous sommes bien plus expert.e.s qu’eux, bien plus capables qu’eux de redonner à l’économie son sens originel. La « décence ordinaire » – expression qu’utilisait Orwell pour décrire le sens moral inné et les pratiques solidaires propres aux milieux populaires –, c’est nous ! Et c’est de cette décence ordinaire que notre économie a besoin.

Dans cette reprise en mains de l’économie, nous devons nous rappeler une chose : la séparation des champs est un principe de la domination. Le capitalisme a réussi à faire de l’économie un champ autonome, réservé à quelques experts (vous savez : les Dominique Seux et les François Lenglet qui, sur le service public, nous livrent régulièrement leur exposé de 1ère année d’école de commerce) dont nous ne faisons évidemment pas partie. Il est parvenu à nous faire percevoir l’écologie, le social ou encore la culture comme étant des champs séparés de l’économie : occupez-vous de créer votre AMAP, devenez bénévoles des Restos du cœur, montez un festival de musique… mais laissez faire le boulot des experts économiques… Occupez-vous de social, d’écologie, de culture, mais pas d’économie !

Or, séparer l’économie, le social, l’écologie, la culture, c’est aussi absurde que de sortir un gâteau du four et de vouloir séparer la farine, l’œuf, le sucre et l’eau. Aussi, à ceux qui en réaction à notre article COVID-19, l’ami des dominants, nous écrivaient : « L’absence du terme Écologie dans cet article est probablement révélatrice de la maladie infantile communiste de ses auteurs qui sont capables de penser par l’économie mais incapables de penser par l’écologie », nous répondons : il n’y a pas plus écologique que la proposition de mettre fin au régime de propriété lucrative des moyens de production. Il n’y a pas plus sociale que cette proposition. Pas plus culturelle. Pas plus économique.

Nous ne comptons plus les catastrophes dont le capitalisme est responsable. Il est évident que la pandémie que nous vivons est causée par ce système qui a entraîné l’explosion des mobilités, la compétition effrénée pour les ressources, la destruction des écosystèmes et des systèmes de soin, d’éducation, de recherche, etc. Bâtir une alternative au système capitaliste commence par l’éviction de ses représentants, car nous ne réglerons pas les problèmes avec ceux qui les ont créés. Une fois débarrassé.e.s de la classe capitaliste, il nous faudra socialiser les moyens de production et substituer à la propriété lucrative la propriété d’usage des moyens de production par les travailleur.se.s, seules forces productives du système. Ce n’est qu’une fois souverain.e.s sur la production que nous pourrons décider de ce que nous produisons et des conditions dans lesquelles nous le produisons pour un respect du vivant. Décideur.se.s de la production et des investissements nécessaires, propriétaires de notre outil de travail et titulaires de notre salaire, nous mettrons alors fin à l’agro-business, relocaliserons la production, organiserons le réempaysannement des terres, supprimerons la publicité intempestive, retrouverons notre souveraineté monétaire, remplacerons le crédit par la subvention d’investissement, instaurerons la sécurité sociale alimentaire… La mise en place d’un marxisme vert, en quelque sorte ? Non : d’un marxisme libertaire.

Le journal Fakir faisait sa Une il y a quelques années avec ce titre « Devenez Bio-lchevik ». Il va falloir user de pédagogie pour faire entendre que notre perspective écologique est communiste. Nous sommes prêt.e.s.

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